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Haïti-Fête des Mères : Faut-il fêter les mamans pendant la crise?

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En Haïti, malgré les conditions de pauvreté, on fête les mamans, chaque dernier dimanche du mois de mai, de manière traditionnelle. Dans le temps, cette fête était surtout marquée par des gestes de rapprochement familial, de petits voyages vers les provinces pour visiter grand-mère, des va-et-vient aux shops, pour se procurer de jolis cadeaux à nos mamans, grand-mères, épouses, belles-mères, amies, aux femmes qui nous sont chères. Mais en pleine crise où le confinement imposé par les autorités sanitaires tente de réduire toutes activités personnelles et commerciales à zéro, comment célébrer nos vaillantes femmes dignement, pendant cette crise?

En effet, il arrivera de toute façon, le 31 Mai 2020, date à laquelle, traditionnellement, Haïti va fêter des mères. Certes, les «portes-promesses» du gouvernement en place, de concert avec certaines associations féministes, vont nous assourdir avec leurs discours flatteurs, étalant les bonnes vertus des femmes haïtiennes, comme la coutume l’oblige. Ces paroles arriveront peut-être aux oreilles de ces femmes chanceuses d’avoir accès à l’internet ou à une source d’énergie électrique quelconque. Mais la grande majorité des femmes haïtiennes ont tristement du mal à trouver de bonnes raisons pour fêter.

Par exemple les «Madan Sara», des femmes qui risquent leur vie au-dessus des camions remplis de marchandises sur des routes exécrables, pour pouvoir vivre dignement avec leur famille, rencontrent d’énormes difficultés. D’abord, il n’y a pas une politique agricole qui les accompagne, tant dans la formation de technique agricole, pour celles qui ont des jardins, de crédit agricole, etc. Ces femmes dont la bravoure devait quotidiennement être honorée, restent impuissantes face au pourrissement de leurs denrées en raison du transport. À tout cela, s’ajoute le phénomène des gangs qui pillent et incendient leur marchandise, comme bon leur semble, aux yeux d’une institution policière fantôme, protégeant nos autorités corrompues. En effet, nos «Madan Sara», les héroïnes de combativité, esquivant des projectiles, tout en étant rançonnées par des bandits armés, et surtout aux marchés publics de la Croix-des-Bossales et de Croix-des-Bouquets, n’ont plus besoin de votre discours, mais plutôt d’action pour permettre que leurs activités soient rentables économiquement, et qu’elles ne soient pas livrées à la merci de ces bandits.

Après plus de deux ans de crises politiques aiguës, suivies d’une pandémie à la fois menaçante et génocidaire, la population est aujourd’hui deux fois plus pauvre qu’il y a de cela trois ans. En conséquence, les femmes sont le plus souvent victimes des inégalités sociales grandissantes et des abus et crimes de toutes sortes. En ce qui concerne l’accès à l’emploi et à une rémunération juste et équitable, ces femmes laborieuses sont contraintes de rester chez elles. C’est un chômage forcé qui conduira à l’accroissement de la misère dans leurs foyers. Dans ce cas, nous devons une surprise de la première importance à celle aussi, en tant que maman devrait arriver à convaincre le président, son mari, de matérialiser la promesse de support financier de trois milles gourdes à toutes les mamans haïtiennes, avant que la fête n’arrive.

Reconnaissant qu’il est de tradition de fêter grandiosement les mamans en Haïti chaque dernier dimanche du mois de mai, je vous invite, tous mes concitoyens, spécialement les enfants et époux, à profiter de cette occasion, pour offrir à toutes nos belles mamans, un gros sourire et de gentils mots qui démontrent notre affection envers elles. Rappelons aux enfants la nécessité et l’obligation de témoigner du respect envers ces êtres si sensibles et si fragiles qui se sont sacrifiées pour nous donner la vie et nous protéger au péril de leur vie. Les mesures de distanciation physique ne sont guère synonymes de distanciation familiale. Célébrons les mamans haïtiennes de la façon la plus modeste et sincère. Il est de notre devoir de protéger ces femmes aujourd’hui, surtout pendant cette pandémie de COVID-19 qui affecte beaucoup plus les personnes plus âgées et celles qui ont leur santé déjà fragile.

Pour finir, j’enlève mon chapeau et je m’incline devant toutes nos mamans, ces femmes héroïnes dont la présence suffit pour apporter l’espoir d’un meilleur avenir. À toutes nos femmes créoles, nos belles mamans haïtiennes, en guise de «bonne fête des mères», je vous renouvelle mon amour pour vous, tout en vous conseillant de vous protéger pendant cette pandémie de COVID-19. Sachez, mes frères, que nous devons agir avec la sagesse nécessaire et la force proportionnelle contre toute personne ou entité locale qui porterait atteinte à l’intégrité, à la pudeur et la dignité des femmes mamans haïtiennes.

PS : le mot « femmes » est employé pour désigner mamans actuelles et futures mamans.

Job Pierre Louis

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