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Les 8 prémisses les plus alarmantes de la résolution 2653 de l’ONU contre Haïti ?

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  1. Soulignant qu’il incombe en premier lieu au Gouvernement haïtien de s’attaquer aux facteurs persistants d’instabilité et d’inégalité… 

La priorité du gouvernement de facto de monsieur Ariel Henri était d’instaurer la sécurité et le retour à la normalité, après le vide institutionnel causé par l’assassinat du président Jovenel Moïse, dans la nuit du 6 au 7 juillet 2021. Cela aurait permis de préparer un environnement adéquat pour l’organisation des élections parlementaires et présidentielles, de sorte à remettre la République sur les rails de la démocratie avec un président légitime et des parlementaires élus par le peuple haïtien. Dans la confusion politique qui avait amené monsieur Ariel Henri à la Primature, on ne sait pas vraiment qui avait défini les grandes priorités pour le gouvernement de transition, comme son choix fut plutôt imposé par le syndicat des diplomates accrédités en Haïti. En fait, la communauté internationale a ignoré tous les accords des acteurs politiques pour la formation d’un gouvernement de salut public. Si l’ONU définit autrement la mission de la transition politique, il faudra se demander si le premier ministre Ariel Henri est un repeat de l’ex-PM, Gérard Latortue qui travaillait comme un expatrié des Nations Unies à la tête de la Primature. En témoigne la résolution H. RES. 941 (109th), présentée au parlement américain pour honorer monsieur Latortue pour les services rendus à ses patrons.

  1. Réaffirmant la nécessité de parvenir à un accord urgent sur un cadre pérenne, assorti de délais et communément accepté, en vue d’un processus politique dirigé par les Haïtiens qui permette d’organiser des élections présidentielles et législatives inclusives, libres et régulières, dès que les conditions de sécurité seront réunies et que la préparation logistique le permettra… 

Ce paragraphe présente une ambiguïté qui risque de légitimer la prolongation d’un gouvernement de facto, prétextant que les conditions de sécurité ne sont pas réunies pour qu’on organise des élections. Nous avons été témoins du manque d’appétit qui caractérise les gouvernements légitimes des ex-présidents Joseph Martelly et Jovenel Moïse. Le vide constitutionnel que le pays traverse aujourd’hui est en grande partie dû au non-lieu des élections législatives visant au renouvellement de la Chambre des députés et des 2/3 du Sénat. Demander à la même équipe au pouvoir de créer les conditions pour recruter ses remplaçants est synonyme d’embaucher des renards pour protéger son poulailler. L’échec, tant dans le domaine de la sécurité publique que dans le non-lieu des élections, est trop convenable. Plus les conflits armés perdurent, plus la transition est pérenne. Il faut fixer une date limite pour l’organisation des élections qui ne dépend aucunement du climat security-related. Car si la Syrie, en pleine guerre civile, a organisé des élections, en Haïti, les élections sont déjà possibles.

  1. Notant qu’il faut interdire le transfert d’armes de petit calibre, d’armes légères et de munitions aux acteurs non étatiques qui participent à la violence en bande organisée, à des activités criminelles ou à des atteintes aux droits humains en Haïti…
  1. Sachant qu’il importe de toute urgence de bloquer les flux financiers illicites à destination d’Haïti, qui permettent aux bandes armées d’opérer et menacent de plus en plus la stabilité du pays, notamment en rompant en priorité les liens entre les acteurs politiques et économiques et les bandes…

Dans ce paragraphe deux points attirent mon attention. Le blocage des flux financiers se fera seulement en direction d’Haïti. Dans l’autre sens, les bandits pourront continuer à payer leurs fournisseurs d’armes et de munitions à l’étranger. N’est-ce-pas ? Le deuxième élément, c’est cette supposée rupture entre les bandes armées et les politiciens. S’appuyant sur notre histoire remplie de persécutions politiques contre les opposants du régime au pouvoir, on risque de voir des listes dressées et envoyées aux Nations Unies, dont le but final est de se défaire de ses adversaires politiques. La constitution haïtienne devrait être notre boussole, non pas la charte des Nations Unies. Nous avons déjà des entités légales pour combattre le blanchiment d’argent, pourquoi rien n’est fait avec nos propres ressources et institutions ? Avons-nous perdu le droit de nous gouverner nous-mêmes ? Nous devons être reconnaissants envers les amis qui nous aident à combattre nos ennemis, mais cela devrait commencer par nous. Où sont les sanctions de l’État haïtien, où sont les interdictions de la justice haïtienne contre les criminels ? L’ONU doit-elle nous envoyer des juges aussi ? Haïti est-elle devenue un État Onusien ?

  1.  Se déclarant préoccupé par le fait que la Police Nationale d’Haïti n’a pas accès aux ports vitaux qui sont largement sous le contrôle des bandes organisées, et demandant qu’il soit mis fin à l’occupation illégale des ports et des terminaux pétroliers par ces bandes… 

Si les ports et les terminaux sont occupés par les bandes armées cela prouverait que les forces de sécurité de l’État haïtien auraient perdu le contrôle des points stratégiques du pays. Alors, si une déclaration, ou l’annonce d’une sanction suffisait pour que les terroristes abandonnent les lieux, il faudra chercher à comprendre qui commande réellement ces groupes armés. La Police Nationale d’Haïti a perdu, au fil des deux dernières années, plusieurs postes de contrôle et commissariats. Si dans certains, ils ont fait des retraits stratégiques, généralement c’est héroïquement sous une pluie de balles qu’ils abandonnent leurs postes. Tristement, tous les policiers ne sont pas aussi chanceux pour s’en sortir vivants après les attaques terroristes. Leurs corps sont parfois mutilés, brûlés et exposés devant les caméras, pour donner la trouille aux policiers survivants. On demande à ces mêmes policiers, sans des équipements blindés et lourds, sans des armes dissuasives et persuasives, d’aller chasser ces bandes criminelles, au péril de leur vie ? Qui commande réellement ces bandes armées ?

  1. Conscient du rôle important que jouent les pays voisins, ainsi que les organisations régionales et sous-régionales telles que la CARICOM et d’autres partenaires internationaux…

Le rôle des organisations, telles que l’OEA et la CARICOM, laisse à désirer. La crise haïtienne, qui s’empire tous les jours, n’a pas attiré que l’indifférence de nos partenaires régionaux. Il est difficile d’inventorier de façon palpable le support reçu de nos voisins dans la crise politique et économique qui déchire la société haïtienne. Au contraire, à chaque crise, ils en profitent pour créer ou ajouter des mesures restrictives visant à empêcher tout flux migratoire vers leurs pays. Si quelques-uns de nos patriotes arrivent sur leurs côtes, ils sont rarement les bienvenus. Leurs droits comme réfugiés et demandeurs d’asile sont ignorés. Nous sommes traités de façon souvent humiliante par nos partenaires de la CARICOM avec qui nous partageons notre histoire, la couleur de la peau, le climat et les exactions coloniales et esclavagistes. Si la CARICOM veut se montrer solidaire avec Haïti, ses États membres doivent commencer immédiatement à réviser et à corriger les mesures discriminatoires contre le peuple haïtien.

  1. Se déclarant profondément préoccupé par les activités criminelles déstabilisantes que continuent de mener les bandes armées en Haïti et par le transfert persistant d’armes de petit calibre, d’armes légères et de munitions à des acteurs participant à la violence en bande organisée ou la soutenant…

Sur ce point, on doit se demander si c’est par négligence ou par erreur, quand on mentionne les armes de petits calibres et armes légères des bandes armées. Les évidences sont partout sur le web ou les bandes armées, les terroristes, étalent leurs armes lourdes et leurs armes de guerre, au su et au vu de tous. Imposer des restrictions sur le transfert des armes légères revient à sanctionner les citoyens haïtiens qui seront incapables d’offrir le minimum de résistance aux bandits. De plus, les forces de police, les juges, les avocats et les fonctionnaires de l’État qui, en général, utilisent ces armes légères, seront les plus impactées. Selon ce paragraphe, les fusils d’assaut, les M4, M16, AK 47, M50, M60, etc., toutes les armes de grands calibres que les malfrats utilisent pour semer la terreur en Haïti, ne seront pas sanctionnées. Espérons qu’il s’agit là d’une mauvaise écriture du document ou tout simplement d’une mauvaise lecture de ma part.

  1. Affirmant que la situation en Haïti continue de menacer la paix et la sécurité internationales dans la région…

Cette phrase est mise ici pour donner un caractère légal aux sanctions onusiennes contre Haïti. Déclarer que les violences, qui affectent les Haïtiens depuis plus de 10 ans, menacent la paix et la sécurité internationale, est une exagération voire une fausseté grossière. Assumons, pour un instant, que c’était le cas, pourquoi après autant de crimes, de vols, viols et assassinats que, maintenant, la sécurité et la paix du monde soient en danger ? Non, ce n’est pas le cas. C’est plutôt le peuple haïtien qui est en danger en permanence, depuis l’abolition du système européen esclavagiste, suivie par la défaite de la plus grande armée impérialiste de Napoléon Bonaparte, au début du 19e siècle. Nous n’avons attaqué aucun peuple de la région, si ce n’est pour nous défendre des entreprises racistes et coloniales de nos voisins.

Au fait, nous avons subi les occupations par des forces étrangères, incluant les forces onusiennes, contre notre propre volonté. Les maladies contagieuses comme le SIDA, la syphilis, le choléra et le COVID furent introduits chez nous par les étrangers. Les terroristes qui mettent le pays à feu et à sang achètent des armes lourdes, des armes de guerres qui ne sont pas fabriquées en Haïti mais chez nos voisins de la région. Ces sanctions utilisent des justificatifs qui sont contraires à la charte des Nations Unies, en niant notre droit à l’autodétermination et en appliquant des mesures restrictives qui, dans le passé, ont causé des dégâts énormes dans notre économie et développement social. La résolution 2653 est une ingérence flagrante dans les affaires internes d’un État souverain et indépendant. Rien ne justifie ces sanctions contre Haïti qui n’est pas en guerre avec une nation étrangère ni en guerre civile qui sont les deux cas appropriées aux interventions de l’ONU pour favoriser la paix et la réconciliation. En effet, je vous invite à lire un rapport bien élaboré par l’experte dans ce domaine, Felicia Swindells, qui traite des contradictions des Sanctions de l’ONU contre Haïti en 1993, sanctions qui sont en contradiction avec les articles 41 et 55 de la charte des Nations Unies. Son travail peut aussi s’appliquer pour la résolution 2653 de l’ONU.

Liens :

  1. Felicia Swindells, Fordham International Law Journal Volume 20, Issue 5 1996 Article 13 https://ir.lawnet.fordham.edu/cgi/viewcontent.cgi?referer=&httpsredir=1&article=1807&context=ij
  2. Résolution 2653 contre Haiti https://documents-ddsny.un.org/doc/UNDOC/GEN/N22/646/07/PDF/N2264607.pdf?OpenElement
  3. H.Res. 941 (109th) : Honorine the service of Gerard Latortue, Haiti’s Intérim Prime Minister. https://www.govtrack.us/congress/bills/109/hres941/text/ih

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