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«L’architecture aux couleurs de la solidarité et de l’espoir, par la magie créatrice de l’architecte germano-burkinabé, Diébédo Francis Kéré»

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Le présent article n’a aucune prétention ni la moindre velléité de nous convier à l’étude d’un traité d’architecture ou d’une critique architecturale autour de l’œuvre de l’auteur en question ni encore moins de camper sa bibliographie en constante évolution et expansion. C’est donc la façon la plus illustrative et inspirante de décrire le parcours singulier de l’architecte germano-burkinabé, Diébédo Francis Kéré, sous l’onction des dieux, via son génie créateur, dans une combinaison bien dosée de l’art et de la solidarité, qui, après des années de macération, au moment opportun, allait le convertir d’un enfant en situation de précarité, de vulnérabilité et d’exclusion, au 45e lauréat du prix d’architecture Pritzker, édition 2022, pour désormais faire son entrée triomphale dans le panthéon des plus célèbres architectes du monde.

Avant d’avancer, rappelons que la première édition du prix d’architecture Pritzker fut célébrée en 1979, il y a 43 ans. Né à Cleveland, Ohio, en 1906, et décédé en janvier 2005, à New Canaan, Philip Johnson, par ce prix, peut être considéré comme la première grande célébrité avérée de l’architecture moderne. Figure emblématique de son époque pour ses contributions dans la définition de l’architecture postmoderne, il est l’un des pionniers du style international. Considéré comme la plus prestigieuse reconnaissance dans le domaine de l’architecture, au rang de Prix Nobel d’architecture, l’objectif premier du prix d’architecture Pritzker consiste à honorer et à récompenser annuellement l’architecte dont l’œuvre construite dénote, d’une part, une authenticité hors pair, par le biais de la combinaison de ses qualités et talents, et, d’autre part, une nouvelle vision conditionnée par une atmosphère d’innovation et d’engagement authentique. En d’autres termes, une production qui met en exergue une contribution cohérente et significative à l’humanité, à travers l’art et l’architecture. Jusqu’à date, l’Afrique et les afro-descendants, donc les Noirs, ont été les grands absents, durant les 42 premières éditions de la plus prestigieuse distinction internationale de la si délicate et, le plus souvent, élitiste profession que constitue l’architecture. Il est donc du devoir, non seulement du monde noir, mais également de l’humanité tout entière, de frémir de joie et d’excitation devant une si transcendantale ascension, plaçant, pour l’année 2022, un Noir au trône de ce sublime art et la mère de tous les arts, qu’est l’architecture.

Diébédo Francis Kéré est un architecte contemporain, né en 1965, dans un petit village appelé Gando, à Burkina Faso, et qui devient depuis la délibération du jury, le premier Noir et le premier Africain à recevoir le prix Pritzker d’architecture. Il a travaillé comme professeur à son alma mater à Berlin, il a enseigné également pendant l’été 2012, à l’Université du Wisconsin, à Milwaukee. Il fut professeur à la Harvard Graduate School of Design, en automne de la même année, et il est devenu professeur à l’Académie d’architecture de Mendrisio en Suisse, en 2013. Kéré vient de prouver au monde que même la profession la plus luxueuse comme l’architecture peut être pourvoyeuse de solidarité et redonner espoir aux communautés pauvres et défavorisées, se trouvant aux confins du monde, comme Gando et d’autres dans le monde. Oui, elles peuvent s’émerveiller et apprécier le sentiment d’être considérées comme faisant partie intégrante d’une seule et même race, la race humaine, bien au-delà de tous les clichés et stéréotypes péjoratifs pour leur servir d’épithètes de caractérisation et de catégorisation. « Moulant de la boue comme du béton et privilégiant les matériaux locaux aux matériaux importés, Kéré propose une vision de l’architecture qui, à la fois, renforce les communautés et répond à la crise climatique. En tant que tel, l’annonce du prix Pritzker, de mardi, n’est pas seulement un signe d’approbation pour lui, mais pour l’architecture “vernaculaire” – un terme utilisé pour décrire des conceptions qui répondent directement aux climats, matériaux et traditions de construction locaux – elle-même. » L’une des grandes découvertes, ou du moins accentuation de la philosophie d’architecture constructive ou de la construction architecturale de Kéré, c’est bien sa capacité d’implication, d’association et de participation, en dépit des défis de co-pagination avec la population locale, les difficultés pour l’imprégnation des couleurs locales et l’utilisation des matériaux locaux.

Quand l’architecture est au service de la solidarité, elle fait plus de grandes merveilles qu’elle en a l’habitude. La qualité de son architecture, l’engagement social et professionnel de l’architecte à construire des projets de grande valeur, dans des circonstances difficiles, c’est ce qui fait sa singularité pour émerveiller la commission chargée de l’évaluation des projets en compétition. Kéré a bien compris qu’il devait aller, c’est-à-dire revenir vers lui-même, pour faire ce que lui seul, du moins en ce moment précis, pouvait faire. Il incarne la poétique esthétique à la fois de l’architecture « classique », « renaissante » et « moderne » africaine, au couleurs locales, c’est-à-dire profondément ancrée dans l’âme africaine, avec tout ce qu’elle implique. Ce n’est certes pas sans raison qu’il a donc fallu attendre, qu’en 43 ans d’histoire, Kéré soit le tout Premier architecte Noir et Africain à revendiquer cette si prestigieuse distinction.

C’est un fait, Kéré sera officiellement nommé lauréat du Pritzker, lors d’une cérémonie à Londres, plus tard cette année. Il est désormais le premier Noir et le premier Africain à réaliser une telle geste. Et, en tant qu’architecte et afro-descendant de provenance sociale modeste, je ne peux qu’être fier de lui. Par la culture et la solidarité, l’humanité recouvrera son humanité. C’est ce que signifie le couronnement atypique, mais bien mérité, de l’architecte germano-burkinabé, Diébédo Francis Kéré : la plus grande distinction qu’un architecte puisse recevoir. C’est ce que le prix d’architecture Pritzker, dans son édition 2022, vient de nous prouver, en le faisant entrer, par la grande porte, dans le panthéon des Immortels de cette si belle religion de l’art et de la culture, qu’est l’architecture.

Jean Camille Étienne,

Architecte et Msc. en Politique et Gestion de l’Environnement

20/03/2022

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