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L’arrogance de l’illettrisme

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À travers les siècles, mis à part quelques rares exceptions, les sociétés ont toujours choisi de confier la direction politique des affaires de leur pays à des sages. En Haïti, par exemple, après le kidnapping du Président Aristide, le 29 février 2004, on a connu la formation du Conseil des Sages, devant accompagner le gouvernement provisoire dans la gestion du pays. Cette sagesse dont il est question, comme c’est toujours le cas dans tous les domaines, ne réfère point à l’âge mais plutôt à la capacité de réflexion, de discernement, de jaugeage et de décision, sans fanfare ni trompette. Les dix (10) dernières années de la vie politique du pays ont surtout été marquées par les dérives de l’inculture PHTKiste et, par conséquent, de son illettrisme. Partant de Martelly, laissé de côté dans ce papier, le comble aura été atteint avec Jovenel Moïse.

Une arrogance affairiste

Promettant monts et merveilles durant son mandat, comme si ces prédécesseurs étaient des cons ou des voleurs, au pur sens de ces termes, Jovenel n’avait que l’accession au pouvoir, et aux possibilités qui en découlent, comme seules motivations. D’abord, il le fallait pour tenter de couvrir les crimes financiers commis par l’équipe de son mentor et dont il faisait partie. «Bien compté, mal calculé», le rapport d’audit de la gestion des fonds PetroCaribe, du Président Préval à Martelly, mentionnera le nom de Monsieur Jovenel Moïse pas moins de 69 fois. L’important, ici, c’est qu’aucune leçon n’a été apprise.

Oubliant vite les promesses de conjuguer l’énergie humaine à celles de l’eau, du soleil et de la terre, pour créer de la richesse et mettre de la nourriture dans les assiettes et de l’argent dans les poches de l’Haïtien, Jovenel débute son mandat par une caravane gloutonne, bouffant d’énormes ressources du trésor public pour aboutir à zéro résultat. Alors que les récoltes de céréales et de haricots s’obtiennent trois à six mois après l’ensemencement, après 50 mois de gouvernement et de non-gouvernance, 1,5 millions d’Haïtiens sont menacés de famine extrême, selon les Nations Unies qui cherchent activement 235 millions de dollars pour venir faire la fête, sur la faim de nos compatriotes et le dénuement national. À date, il n’y a eu aucune récolte résultant de l’effort du gouvernement de monsieur Moïse.

À l’image du téléphérique promis, à l’occasion des 300 ans de la ville du Cap-Haïtien, « l’électricité 24/7, promise après 24 mois » n’est pas au rendez-vous jusqu’à présent et ne le sera peut-être jamais avec ce gouvernement devenu « de facto », depuis tantôt deux mois. SOGENER, évincé sous le prétexte de vice de forme dans l’octroi de la centrale de Varreux par le gouvernement de Préval, prétexte valable et tout à fait juste, entre autres, une compagnie turque sera sélectionnée – sans respect des procédures d’appel d’offres, prévues pour l’octroi de ce type de marchés – pour fournir l’électricité à la capitale, à partir d’un bateau, sans aucune infrastructure sur le territoire. La gabegie, combinée au pillage, se poursuivant, l’acquisition, par la Présidence au profit de la PNH, de blindés de transport de troupes, aurait été faite pour le double de leur prix sur le marché international. Parmi ces blindés, trois au moins ont déjà été séquestrés et incendiés par le gang du Village-de-Dieu et contribué à l’assassinat de plusieurs policiers, pour avoir trop fait confiance à ces matériels. À ce menu des gabegies et de pillages est venue s’ajouter la location d’hélicoptère à un prix exorbitant, pour les déplacements du Président.

Au chapitre de cette arrogance, il faut ajouter la mise périodique de devises sur le marché des changes pour stabiliser le cours de la gourde par rapport au dollar. Avant ce gouvernement, ce genre d’opérations se faisait par le biais d’appels d’offres, auxquels participaient les principales institutions financières du pays. Mais, depuis quelque temps, alors que les dollars sont injectés à un taux inférieur, d’environ dix points par rapport au taux pratiqué sur le marché informel, aucune information ne filtre sur les principes suivis par la BRH, dans le cadre de l’octroi de ces dollars par l’État.

Ignorant les prescrits légaux ou refusant de suivre la voie tracée en matière de conduite des marchés publics, à chaque cas de non-approbation d’un dossier quelconque en raison de faute de procédures, le pouvoir tient pour responsable l’institution concernée. Il s’ensuit un affaiblissement des institutions républicaines, à la mesure du mépris de la chose publique, porté par la vision restreinte et l’ignorance de l’équipe au pouvoir.

Une arrogance politique

Élu avec un total de 600 mille voix, sur un électorat d’environ 5 millions de personnes en âge de voter, Jovenel Moïse choisit un Premier Ministre qui déclarera au Champ-de-Mars que le PHTK gardera le pouvoir pour 50 ans. Plus tard, au cours du mandat, c’est Jovenel Moïse lui-même qui monte au créneau pour rassurer que, peu importe ce que font les autres partis, ils ne pourront pas arracher le pouvoir des griffes de PHTK.

C’est ce parti au pouvoir qui, disposant d’une majorité au Parlement, n’a pas réalisé, pendant quatre ans, les élections devant renouveler la classe politique à la tête du pays. À la fin de la 50ème Législature, les Députés et Sénateurs proches du pouvoir sont recasés, soit comme Conseillers ou Consultants dans l’Administration Publique, principalement auprès de la Présidence, ou comme personnel des ambassades ou consulats d’Haïti à l’étranger où travaillaient déjà, dans la plupart des cas, les épouses, maîtresses et/ou des parents de ces ex-Parlementaires.

Comme si tout cela ne suffisait pas, ce gouvernement, porté dans ses élans par l’international, se donne pour attributions un changement de Constitution, alors que tout amendement de la Constitution en vigueur doit se faire suivant les prescrits de ses articles 282 à 284. Par rapport au référendum que prétend organiser Jovenel Moïse pour changer ou non la Constitution, la Constitution Haïtienne de 1987 Amendée prévoit en son article 284-3 que: «Toute Consultation Populaire tendant à modifier la Constitution par voie de Référendum est formellement interdite.» Aujourd’hui, en vertu de la grande Charte Nationale, la Constitution de 1987 Amendée, le mot «RÉFÉRENDUM» ne saurait faire l’objet de débat. Pour ce faire, il faudrait qu’une nouvelle Législature statue sur l’article 284-3, en y levant l’interdiction. Alors, sous l’égide de la nouvelle Constitution Amendée, une fois son application commencée, le pouvoir, quel qu’il soit, pourrait prétendre organiser un référendum sur le sujet. Un référendum est possible sur n’importe quel autre thème majeur de la vie haïtienne, sauf sur la modification de l’actuelle Constitution en vigueur. Pour y arriver, le pouvoir aurait habillé des bandits en policiers, pour renforcer la frange de la PNH vendue à sa cause et arrêter – voire assassiner – toute personne qui ose dire non à ses dérives.

Pour finir, après avoir mis en pièces les différentes institutions républicaines dont la dernière victime est la Police Nationale d’Haïti, remplacée en fait par le G9, le BSAP et les « All Black », la dernière prétention de Jovenel Moïse, des PHTKistes et de la communauté internationale, coalisée sous le nom de Core Group, est de changer la Constitution. Tant qu’il est encore au pouvoir, ne serait-ce que de fait, comme c’est le cas actuellement, il n’y renoncera pas ; poussé par l’international.

Au Peuple Haïtien de sonner le glas de ce régime confiné dans le banditisme légalisé, au détriment des intérêts nationaux !

Ygor Capois

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