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«Les conséquences possibles des actes posés par le gouvernement, en dehors de la Constitution».Que dit la Loi ?

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Le deuxième lundi de janvier 2020, alors que le pouvoir exécutif n’avait pas réalisé les élections pour renouveler le personnel politique, par un simple «tweet», le président Jovenel Moïse a dit constater la caducité du Parlement, pour interdire, par la suite, à dix (10) sénateurs de la République, l’accès au Parlement, laissant ainsi ce dernier avec seulement dix (10) sénateurs, et une Chambre des députés totalement vide. Ce que le président ignore, c’est que même avec les dix (10) sénateurs en fonction, le Parlement existe encore.

Entre-temps, le chef du gouvernement, Jean-Michel Lapin, qui expédiait jusque-là les affaires courantes, selon l’article 165 de la Constitution de 1987, a donné sa démission au mois de mars 2020, et le président a nommé pour le remplacer, monsieur Joseph Jouthe qui, du coup, forme un nouveau gouvernement, avec un ensemble de «fonctionnaires» investis en dehors des prescrits constitutionnels.

Au regard de l’article 155 de la Constitution, le gouvernement se compose du Premier Ministre qui est le chef du gouvernement, des Ministres et des Secrétaires d’État. Et, pour qu’il y ait Premier Ministre, Ministres et Secrétaires d’État, l’article 158 de la Constitution fixe les conditions. Cet article dit ceci : «Le premier ministre, en accord avec le président, choisit les membres de son cabinet ministériel et se présente devant le Parlement, afin d’obtenir un vote de confiance sur sa déclaration de politique générale. Le vote a lieu au scrutin public et à la majorité absolue de chacune des deux Chambres.» Plus loin, il dit: «Dans le cas d’un vote de non-confiance par l’une des deux Chambres, la procédure recommence.»

Donc, selon la Constitution, on n’est Premier Ministre, Ministre, Secrétaire d’État, que par le vote du Parlement. Inversement, investi en dehors de la procédure constitutionnelle, on n’est pas Premier Ministre, ni Ministre, ni Secrétaire d’État.

Si, dans la pratique ou dans les faits, on peut être Premier Ministre, Ministre et Secrétaire d’État sans le vote du Parlement, par contre, le statut de ces fonctionnaires, n’est pas de droit ou de jure, mais de fait ou de facto. Or un gouvernement de facto, puisqu’il n’est pas reconnu par la Constitution, ses engagements et actes pris ne peuvent pas être assurés, surtout s’ils engagent l’avenir de la nation.

Un accord, un traité, une convention, ne sont ce qu’ils sont, que par le vote de ratification par le Parlement, toujours selon la Constitution en ses articles 98-3 et 139. Et, un gouvernement de facto, puisqu’il n’a ni de légitimité, ni d’autorité encore moins de légalité, les accords, traités et conventions signés par ce gouvernement, sont donc attaquables, voire même annulables, avec toutes les conséquences de droit.

En ce qui concerne les personnes qui occupent ces fonctions (Premier Ministre, ministres et secrétaires d’État) dans ces conditions irrégulières, comme ils ne sont pas de droit, ils sont comme des gens qui s’imposent de force aux citoyens. En conséquence, les actes ou engagements pris et signés, n’engagent qu’eux-mêmes. Ces actes peuvent être remis en question à tout moment, et des poursuites peuvent être engagés contre quiconque, que ce soit par devant les tribunaux et cours d’Haïti ou des tribunaux internationaux, en vertu du grand principe : la fraude corrompt tout, qui rend nuls et non-avenus, tous ces actes.

À noter qu’il est fait obligation au président de la République de veiller au respect et à l’exécution de la Constitution et à la stabilité des institutions (article 136).

La Constitution ne saurait prévoir des vides majeurs qui seraient le produit de la malhonnêteté des hommes ou des membres des pouvoirs de l’État. Et pour les moindres vides prévus, il existe déjà des mécanismes de correction rapides que la Constitution apporte elle-même.

Fort de ces considérations, l’on admet que le président a, soit failli à sa mission, soit violé la Constitution ; ce qui mériterait encore une sanction. Donc, il ne saurait profiter de ses propres irresponsabilités, voire prendre son plaisir dans des nominations irrégulières et inconstitutionnelles.

Ces considérations sont valables aussi pour tous ceux-là qui occupent la fonction d’agents exécutifs intérimaires, une fonction qui n’a aucune référence constitutionnelle. Leurs actes peuvent être facilement annulés et provoquer des poursuites tant administratives que pénales à l’avenir.

Enfin, personne n’a intérêt de prendre plaisir dans l’illégalité et l’inconstitutionnalité, voire occuper des fonctions qui contraignent à prendre des décisions sous prétexte de la continuité de l’État et qui peuvent avoir des conséquences de droit, néfastes pendant toute sa vie, alors qu’on pourrait être de bonne foi.

Me Inseul Salomon

Avocat, sociologue

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