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Le décret du 21 mai du président, fustigé de tous les côtés

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Dans un décret publié le 21 mai dernier, l’exécutif a défini un ensemble de règles générales pour la protection de la population contre la pandémie de COVID-19 en Haïti. Dans ce décret, des sanctions sont prévues pour tout contrevenant à ces principes qui, selon les autorités, visent à ralentir la propagation du virus sur le territoire. Dans une lettre ouverte adressée aux Président, Vice-président et Membres du Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire (CSPJ), le juge Jean Wilner Morin, Président de l’Association Nationale des Magistrats Haïtiens (ANAMAH), a dénoncé le décret du 20 mai dernier relatif aux règles générales de protection face à la COVID-19, tout en se disant disposer à se joindre, de bonne foi, aux initiatives raisonnables qui tendent à faire reculer cette maladie. Il souligne, qu’en une telle circonstance, «la raison et le bon sens ne doivent en rien le céder à la panique. Ce décret témoigne de l’état d’esprit d’un législateur qui, à défaut de manquer de bon sens, laisse entrevoir une méconnaissance avérée de la réalité du fonctionnement des tribunaux de proximité d’une part, et du rapport d’adéquation qui doit toujours et nécessairement exister entre la loi et les faits sociaux, d’autre part», a écrit le président de l’ANAMAH. Le Juge Morin a aussi souligné que «plusieurs autres dispositifs du dit décret décadrent la réalité légale et sociologique de fonctionnement des Tribunaux de simple police et sont susceptibles d’exposer les Magistrats de Paix au lynchage en règle de politiciens en mal d’autorité.» Il a demandé, à cet effet, au CSPJ, de voir avec l’auteur de ce décret, «ses difficultés d’application sereine, en l’état actuel». Pour sa part, le bâtonnier de l’Ordre des Avocats de Port-au-Prince, Me Monferrier Dorval, a fait savoir que le Barreau qu’il dirige offre ses services gratuitement au gouvernement, en vue de la révision du décret du 21 mai qui ne cesse de soulever des controverses. Le bâtonnier, qui n’a pas été tendre, a déclaré: «de toute façon, on va revoir le texte. Si on va le revoir». Notons que les grandes lignes du décret sont les suivantes:

– Durant cette période de crise sanitaire, le couvre-feu est activé de 8 heures du soir à 5 heures du matin, sur tout le territoire. En son article 9, le décret a précisé que ces heures pourront néanmoins être modifiées par arrêté pris en Conseil des ministres, suivant la nature et l’évolution de la pandémie. Tout contrevenant à cette mesure payera une amende de 3 mille gourdes et est passible de 5 jours d’emprisonnement ou de 15 jours de travail d’intérêt général, à déterminer par le conseil municipal.

– Toutefois, les dispositions du premier alinéa de cet article, ne s’appliquent pas notamment aux journalistes, aux agents des forces publiques de service, aux personnels médicaux.

–           Le port du masque ou d’un équipement de protection individuelle, protégeant au moins la bouche et le nez, est obligatoire dans les lieux publics. En cas de violation, une amende de 3 mille gourdes sera exigée, en plus de 5 jours d’emprisonnement ou 15 jours de travail d’intérêt général. Selon l’article 8 du décret, «cette obligation s’applique dans tous les centres et établissements commerciaux, les institutions publiques et privées». «Cette obligation ne fait pas obstacle à ce qu’il soit demandé de le retirer pour la stricte nécessité du contrôle de l’identité du porteur. Par ailleurs, cette disposition ne s’applique pas aux enfants de moins de 5 ans, aux personnes ayant des difficultés respiratoires.

–           À travers le document, les autorités précisent que «tout rassemblement, réunion ou activité mettant en présence, de manière simultanée, plus de 5 personnes en milieu clos ou ouvert, est interdit sur le territoire de la République». Tout contrevenant fera face à une amende de 3 mille gourdes, 5 jours d’emprisonnement ou 15 jours de travail d’intérêt général.

–           Dans son article 16, le décret précise que la publication des résultats du test d’un patient est interdite sans son autorisation. La prise de photo, de vidéo ou toute autre technique de capture d’image d’un malade atteint du coronavirus est également interdite, sans son autorisation. «Tout contrevenant paiera une amende de 10 mille gourdes, passera 15 jours d’emprisonnement ou (effectuera) 30 jours de travail d’intérêt général».

– En son article 15, le décret fixant les règles générales de protection mentionne que la publication de photos ou vidéos sur les réseaux sociaux de cadavres de personnes tuées par le virus est prohibée. Une sanction de 20 mille gourdes, de 15 jours d’emprisonnement ou de 30 jours de travail d’intérêt général est prévue.

 

Aux conducteurs de véhicule

Dans le cadre de ces dispositions, il est stipulé que tout conducteur de véhicule ou matériel de transport doit procéder au nettoyage désinfectant de la voiture, au moins 1 fois par jour. «Le véhicule doit être aéré en permanence, sous peine de 3 mille gourdes d’amende et de 5 jours d’emprisonnement», stipule l’article 3 du décret. Cette sanction sera applicable également à tout conducteur de véhicule qui ne communique pas aux voyageurs les mesures d’hygiène et de distanciation sociale ou toutes autres mesures nécessaires, suivant la nature de la pandémie. Le chauffeur, selon l’article 5 du décret, est autorisé à refuser l’accès du véhicule ou du matériel de transport, à toute personne ne voulant pas porter un masque de protection. Le jeudi 21 mai 2020, a été publié dans le journal officiel de la République d’Haïti, «Le Moniteur», ce décret fixant les règles générales de protection de la population, en cas de pandémie / épidémie, applicables jusqu’à la fin de l’état d’urgence sanitaire. Le bâtonnier de l’Ordre des avocats de Port-au-Prince, Me Monferrier Dorval dit reconnaître le bien-fondé de ce décret pour protéger la population. Toutefois, il croit qu’il n’en demeure pas moins que certaines dispositions sont contraires à la Constitution et ne tiennent pas compte du fonctionnement de la justice, dans cette période.

Altidor Jean Hervé

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